A la fin d’un
reportage de 2 minutes sur la
conversion des
véhicules thermiques en
électriques, diffusé sur
TF1 dimanche 11 août 2019 dans le cadre du journal de 13 heures, une voix off informe :
« Aujourd’hui le prix est prohibitif, entre 20.000 et 30.000 euros, mais les concepteurs assurent qu’une production à grande échelle pourrait ramener le coût de la transformation à seulement 5.000 euros, bonus écologique déduit ». Est-ce réaliste ? Est-ce que ce tarif serait de nature à convaincre nombre d’automobilistes ?
C’est dans l’AIRe
Pour réaliser son
reportage,
TF1 a rencontré quelques acteurs de l’association
AIRe (Acteurs de l’industrie du
rétrofit électrique). Et en particulier Aymeric Libeau, fondateur de la startup française
Transition-One, installée à Orléans (45), et qui souhaite proposer au plus tôt le
rétrofit électrique à un tarif abordable. Anticipant un nécessaire changement de réglementation qui zapperait l’aval du constructeur d’origine, la jeune entreprise communique sur son savoir-faire en exhibant une Renault Twingo II essence convertie et en citant quelques autres bonnes bases sur lesquelles travailler : Fiat 500, Citroën C1, Peugeot 107, Toyota Aygo et Volkswagen Polo. Pour une utilisation quotidienne,
Transition-One préconise une autonomie d’environ 100 kilomètres et une vitesse maxi limitée à 110 km/h. Pour cela, le groupe motopropulseur pourrait être composée d’un moteur d’une puissance de 50 kW, comme sur la Twingo régulièrement présentée, et d’une batterie d’une capacité énergétique de 20 kWh au maximum.
Conversion possible pour 5.000 euros ?
Difficile d’imaginer convertir une
voiture thermique en
électrique pour 5.000 euros. Mais
Transition-One n’espère pas le faire non plus pour cette somme. Les 5.000 euros, c’est ce que l’opération coûterait à un automobiliste, après déduction d’une aide gouvernementale égale ou proche de celle qui est actuellement attribuée à l’achat d’une
voiture électrique neuve en France. Arrondissons l’enveloppe totale à 10.000 euros, par exemple. Est-ce suffisant pour un
rétrofit électrique qui suppose que le client soit déjà propriétaire d’une
voiture à transformer ou compterait en acquérir une ? En clair : le budget dédié à la
conversion ne tient pas compte de l’achat de l’engin, ni d’une remise en état éventuelle de la mécanique et ou de la carrosserie.
Pièces et main d’œuvre
L’enveloppe globale de 10.000 euros servira donc à couvrir les nouvelles pièces (moteur
électrique, convertisseur, contrôleur, batterie, chargeur, pédale d’accélérateur spécifique, connecteur de recharge, etc.), mais aussi la main d’œuvre. A ce sujet, la voix off de
TF1 explique que
Transition-One chiffre à 4 heures le temps de montage de ces éléments, à partir d’un
véhicule déjà débarrassé en amont des parties devenues inutiles (bloc thermique, réservoir, etc.). Une performance surprenante, mais qui s’appuie sur l’idée d’intervenir sur une liste définie de modèles pour lesquels la startup disposerait déjà du programme précis d’intervention et des pièces adaptées. De premières livraisons d’anciennes citadines thermiques devenues
électriques sont envisagées dès 2020.
Des astuces pour une conversion à 5.000 (10.000) euros
Pour une maîtrise maximale des coûts,
Transition-One pourrait actionner plusieurs leviers. Le premier, c’est de conserver la boîte de vitesses d’origine. C’est ce qui semble avoir été fait sur la Twingo, à en juger par les images de l’utilisation de ce
véhicule sur la route : on peut observer le conducteur changer de rapport. La batterie est un composant particulièrement onéreux dans un
rétrofit électrique. A elle seule, pour une capacité énergétique de 20 kWh, elle devrait mobiliser de l’ordre de 4.000-6.000 euros, en comprenant le ou les caissons abritant les cellules. Même si l’on peut partir du principe que ce ne serait pas le choix effectué par
Transition-One, il pourrait très bien être envisagé de composer des packs avec des éléments d’occasion mais en bonne santé et peu âgé. La durée de vie de l’ensemble risquerait cependant d’être plus aléatoire.
Faisable, oui !
Dans un contexte où le prix des cellules est à la baisse pour une même capacité énergétique, en tablant sur une aide de 5.000 euros à la conversion de la part de l’Etat, sans compter le coût d’achat et/ou de réfection du
véhicule de base, et en adossant l’activité de
rétrofit électrique à une liste extensible de modèles pour lesquels
Transition-One disposerait d’un kit déjà adapté, le pari de la startup, relayé par
TF1, apparaît serré mais plausible. N’oublions pas qu’il s’agirait d’un prix d’appel. Les performances de l’engin converti seraient en retrait par rapport aux
voitures banchées neuves proposées par les constructeurs, mais l’impact carbone et en polluant divers en serait grandement réduit pour un
véhicule auquel une nouvelle vie serait ainsi ajoutée.
Convaincant pour les automobilistes ?
Les automobilistes seront-ils convaincus par une telle offre ? Pour des personnes se posant nouvellement la question, et en l’absence de signaux forts par l’intermédiaire d’une communication bien ficelée, il y aura forcément un temps d’observation relativement important.
Transition-One pourrait bien sûr compter sur les électromobiliens convaincus qui attendent impatiemment depuis des années de pouvoir convertir un modèle précis, en particulier des youngtimers ou des modèles plus anciens encore mais utilisables au quotidien. Sauf que ceux-ci ne figureront très certainement pas dans la sélection de départ de la startup, rendant l’opération de
conversion plus onéreuse. Alors !? Tout va se jouer avec la force commune de persuasion des membres de l’AIRe. Au-delà d’un tarif alléchant, c’est l’idée du
rétrofit qu’il est important de faire passer. Y compris chez les opérateurs d’autopartage.