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Geely débarque chez Daimler : Une chance pour la voiture électrique ? Rédigé par Philippe Schwoerer le 27 Fév 2018 à 00:00 0 commentaires

En fin de week-end dernier, l’information tombait selon laquelle l’industriel chinois Geely devenait l’actionnaire numéro 1 du groupe Daimler. Il flotte sur cette annonce comme un parfum d’électromobilité qui indique aussi clairement que le premier marché automobile, et en particulier celui des véhicules branchés, sont bien localisés aujourd’hui en Chine. Avec ce bouleversement de paysage, verra-t-on enfin une politique sérieuse de la part de Mercedes pour produire des véhicules électriques, autrement que dans les projections et communiqués ?

Manque de volonté

Si le constructeur à l’étoile avait voulu s’illustrer comme un acteur incontournable de la mobilité électrique, il aurait pu le faire depuis longtemps ! Au contraire, il a fait partie de ceux qui se moquaient d’Elon Musk quand ce dernier révélait ses ambitions pour Tesla. Quand Mercedes se retranche derrière des chiffres mitigés sur les marché pour expliquer pourquoi il ne vend pas de voitures électriques, c’est à la fois du protectionnisme, un manque de lucidité et d’anticipation. Qu’on se souvienne comment a été traité chez Daimler le fameux problème du gaz employé dans les systèmes de climatisation ! Contre l’avis de l’Union européenne et des scientifiques, le groupe avait ameuté le gouvernement, d’autres constructeurs et l’opinion publique tout en continuant à utiliser jusqu’aux pénalisations le R134a à la place du R1234yf ! Pour le véhicule électrique, c’est pareil ! Sa technologie n’est pas dans l’ADN du groupe. Si Tesla, Renault, Nissan et BMW ont pu : alors pourquoi pas Mercedes, avec de la bonne volonté !

Bien sûr…

Bien sûr, Dieter Zetsche, PDG de Daimler, a mis ses célèbres moustaches en jeu l’année dernière si dans 10 ans son groupe n’était pas devenu le numéro 1 des véhicules électriques ! Bien sûr, la Fortwo ED de Smart, – qui fait partie du groupe -, approche la décennie dans le top des immatriculations de véhicules électriques ! Bien sûr, la marque à l’étoile propose une Classe B, mais sans arriver à convaincre son réseau de bien la diffuser ! Bien sûr, le constructeur a envoyé les acteurs Diane Kruger et Joshua Jackson se griller au Soleil de la Death Valley pour prouver son savoir-faire en chaîne de traction électrique à pile hydrogène, promettant au passage de proposer un modèle abordable de ce type au public pour 2017 ! A part promettre et exhiber une technologie qui n’a rien d’exceptionnelle, qu’est-ce que Daimler compte à son actif de concret, convainquant et de différenciant en matière de mobilité électrique en Europe ?

Geely

L’entreprise chinoise Geely n’est pas engluée dans le conservatisme ! Son fondateur, Li Shufu, fils de riziculteurs, présente une première voiture en 1998. Il n’y a même pas 20 ans de cela ! Ce modèle, baptisé « Meerie », avait été perçu comme une copie de copie de Daihatsu Charade équipée d’une face avant façon Mercedes Classe C. Tiens, donc, déjà envie de l’Etoile !? Ce n’est cependant qu’en 2001 que le Chinois devient officiellement constructeur automobile, son groupe Geely s’imposant rapidement comme le premier, de capitaux privés, dans son pays. A en juger par ses acquisitions, l’entreprise cherche à diversifier sa présence dans la mobilité au point de s’être intéressée à Volvo reconnu pour ses avancées en matière de sécurité et aujourd’hui bien placé concernant les véhicules autonomes, aux sportives de Lotus, aux taxis anglais, et aux voitures volantes avec Terrafugia. Et maintenant, Mercedes, en ayant mis plus de 7 milliards d’euros sur la table pour détenir environ 9,7% du capital de Daimler.

Mobilité électrique

Il semble bien que cette mainmise sur Daimler serve les projets en mobilité électrique de Geely. C’est Li Shufu lui-même qui l’a annoncé. Selon la feuille de route des autorités chinoises, tous les constructeurs automobiles qui font du commerce sur le territoire devront vendre au moins 10% de véhicules électriques en 2019, et 12% en 2020. Geely possède déjà la branche bus de Volvo qui commercialise le 7900 Electric. Dans la course, contre Tesla, pour mettre en premier sur le marché un camion électrique, Daimler a présenté en octobre dernier sa vision du genre, sous la forme du E-Fuso Vision One. Concurrent de Geely, BAIC Motor Corporation était jusqu’à présent l’allié historique de Daimler. Les 2 partenaires viennent tout juste d’annoncer l’injection d’un peu plus de 1,5 milliards d’euros dans leur usine sur place, afin de produire les plus récents modèles de Mercedes, dont les électriques bénéficieraient d’une large place.

Comme un étau qui se resserre ?

N’est-on pas en train d’assister à une sorte d’étau qui se resserre autour de Tesla. Alors que le constructeur de Palo Alto s’enlise dans les déficits pour poursuivre un programme de développement de plus en plus ambitieux en véhicules électriques, Geely semble désormais disposer d’un moyen industriel puissant de réplique qui pourrait bien devenir une menace sérieuse à l’heure où les actionnaires pourraient demander à recevoir un revenu à la hauteur de leurs efforts financiers. « Ou ça passe, ou ça casse » : C’est ainsi que de plus en plus d’investisseurs perçoivent la politique de Tesla. Li Shufu pourrait bien en profiter pour éliminer un concurrent qui commence à s’implanter sur son territoire ! Mais n’imaginons pas le pire : une alliance pourrait tout aussi bien être possible, et être premier actionnaire est différent d’être actionnaire majoritaire.

Suspendu

Pour l’heure, le temps semble un peu comme suspendu depuis le passage en force de Geely pour siéger au conseil d’administration de Daimler. A force de jouer des alliances, les constructeurs ont fini par créer des imbrications compliquées. Quid de la coopération de Daimler avec BAIC ? Mais aussi avec l’alliance Nissan-Renault-Mitsubishi, déjà consommée en partageant une architecture commune pour les Twingo III et Smart Forfour II, construites toutes les 2 sur la même chaîne de montage en Slovénie. A l’heure où nous mettons en ligne le présent article, le gouvernement allemand joue la carte de la prudence, en s’inquiétant qu’un représentant d’un concurrent direct et historique, – en l’occurrence Volvo -, siège au conseil de surveillance de Daimler. Des explications sont donc demandées à Li Shufu sur ses intentions. Ce qui répond au souhait de ce dernier de rencontrer les autorités allemandes rapidement. Les moustaches de Dieter Zetsche sont suspendues au décorticage de la situation !

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