Une percée majeure dans les domaine des batteries au lithium-ion pourrait donner un coup de fouet au développement des véhicules électriques et hybrides rechargeables. La portée de ce progrès, réalisé au Québec, est triple: le temps de recharge est considérablement réduit, la recharge en elle-même est complète et la durée de vie de la batterie est décuplée.
C’est à un chercheur principal de l’Institut de recherche d’Hydro-Québec (IREQ) que l’on doit cette avancée. Karim Zaghib a réussi à décharger et recharger au complet 20 000 fois une batterie de 2 kWh en l’espace de six minutes. À l’heure actuelle, aucune voiture électrique ne peut être rechargée à 100% en moins de trois heures, rappelle le chercheur de l’IREQ. «En 30 minutes, on est entre 30% et 40% de la charge», ajoute-t-il. D’où l’importance et les conséquences de ces résultats.
Cette percée représente un «potentiel énorme», selon le physicien et auteur Pierre Langlois. «Ce sont là les meilleures batteries au monde, dit-il. Il n’y en a pas d’autres capables de subir autant de recharges, aussi rapides, sans perte de capacité. Les meilleures batteries sur la planète sont fabriquées ici. Ce coup-ci, c’est réellement la bonne solution.»
Directeur technique du Centre national du transport avancé, Sylvain Castonguay juge que c’est «une percée majeure au niveau de la recharge rapide et de la durabilité des matériaux». «Mais passer des résultats de laboratoire à la réalité, c’est une grosse étape, c’est compliqué», précise-t-il.
Karim Zaghib travaille sur les batteries depuis 1986. Cette percée est connue de la communauté scientifique depuis presque un an et du milieu automobile depuis plusieurs mois. Les travaux de M. Zaghib et de ses collaborateurs doivent être publiés dans le Journal of Power Sources en janvier prochain. Des fabricants de batteries et des constructeurs automobiles ont aussi fait part de leur intérêt auprès de l’IREQ.
«À l’IREQ, nous ne commercialisons pas. Hydro-Québec pourrait, mais nous, ce n’est pas notre mandat», précise son directeur principal, Denis Faubert. Ces travaux sont la propriété intellectuelle d’Hydro-Québec.
Pour en arriver là, M. Zaghib et son équipe de travail ont créé un premier prototype de batterie comparable à ce que l’on trouve dans les ordinateurs portables. Il lui ont fait subir ces 20 000 cycles de charge et décharge en quelques minutes à peine. Puis en une minute, «avec des piles de 4 à 12 volts, d’une capacité de 1 ampère/heure», précise le chercheur. La troisième étape les a donc amenés à effectuer la même opération sur cette batterie de 2 kWh. En extrapolant, ils ont calculé par modélisation que ces 20 000 cycles de décharge et de recharge complète pouvaient, avec un chargeur rapide, se faire en 30 minutes seulement pour une batterie de 30 kWh. Un calcul qui n’a pas été vérifié encore dans la pratique. À titre de comparaison, la Tesla, par exemple, a une batterie de 53 kWh.
La clé de cette réussite réside dans l’association de l’oxyde de fer et de phosphate avec le nano titanate, explique Karim Zaghib. «Le titanate est le seul élément capable de répondre à un chargeur rapide», dit-il.
Le dernier avantage non négligeable de ses recherches est que la température n’affecte quasiment pas l’efficacité de la batterie, testée par -40 degrés comme par 80 degrés.
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