La région Nord-Pas-de-Calais fait figure de précurseur en matière de mobilité électrique avec le lancement, fin 2012, d’un grand plan régional visant à développer le véhicule électrique et les infrastructures de charge sur son territoire.
Entretien avec Laurent Candelier, Directeur du Projet Régional « Véhicule Electrique » au Conseil Régional Nord-Pas de Calais, lors des 2èmes Assises Nationales des Infrastructures de Charge.
L’origine du projet est liée à l’implantation de Renault qui produit la Kangoo sur votre territoire ?
Renault Maubeuge produit la Kangoo électrique, le point de départ étant une lettre d’intention entre le Conseil régional et la société Renault, qui souhaite effectivement développer la voiture électrique.
Pour faire adopter ce plan, vous avez dû faire un gros travail de persuasion auprès des élus ?
Oui. En fait, le point de départ étant que le Président du Conseil régional a souhaité d’emblée développer la voiture électrique. Nous avons un Président visionnaire et qui a perçu dès l’année 2010 un grand enjeu au niveau de la voiture électrique.
Il est vrai que faire adhérer l’ensemble de l’institution régionale n’a pas été simple. Il y avait de vraies questions portées par certains membres de son exécutif. Ainsi, développer la voiture électrique au départ n’allait pas de soi.
Quelles sont les grandes orientations de ce plan ? Il y a d’abord une charte que vous avez fait adopter à certaines collectivités ?
En fait, la région Nord-Pas-de-Calais se dote d’une charte dans laquelle elle s’engage à déployer des bornes de recharge, chose indispensable pour développer la voiture électrique, donc mettre en place un plan de déploiement de charge au niveau de la région Nord-Pas-de-Calais . Elle propose aussi de faire la promotion du véhicule électrique et souhaite porter des projets d’électromobilité, d’autopartage, des projets qui comporteraient de la voiture électrique. À travers ce grand projet régional, la région Nord-Pas-de-Calais a lancé un appel à projet pour aller dans ce sens auprès des territoires compétents pour développer de la mobilité. Elle demande donc à tous ces territoires, s’ils veulent être cofinancés par la région dans ce déploiement, d’adhérer à cette charte.
Quelles sont les mesures concrètes d’incitation à ce déploiement de bornes de recharge ?
La région s’est engagée et a lancé un appel à projet le 20 novembre 2012.
Nous avons démarré avant même l’annonce du plan national de l’État disant que l’on serait accompagné dans le cadre de l’ADEME pour le cofinancement de bornes de recharge (voir notre article ndlr).
Nous avons lancé dans un temps très court un appel à projet, en se disant que l’on avait la capacité d’accompagner trois territoires, pour lesquels on cofinancerait à hauteur de 80 % le coût de l’installation des bornes de recharge.
Quel est le calendrier de déploiement déjà pour ces territoires, et ensuite pour le reste de la région ?
12 territoires ont répondu dans la région Nord-Pas-de-Calais, soit l’équivalent de 1,5 million d’habitants et environ 300 à 400 communes.
Sur ces 12 territoires, trois territoires apparemment sont prêts déjà à déployer des bornes. Nous avons identifié environ 200 bornes de recharge sur ces trois territoires qui seraient certainement déployés courant 2013.
Quels sont les objectifs pour les cinq prochaines années ?
En fait, nous avons un plan sur trois ans : 2013, 2014 et 2015. L’objectif étant de déployer 2.500 points de charge pour le Nord-Pas-de-Calais, c’est-à-dire à peu près 1.250 bornes de recharge, lente, semi rapide et 17 bornes de recharge rapide sur les axes interurbains.
Le déploiement de ces bornes doit vraiment favoriser le développement et la multiplication des achats de véhicules électriques ?
Cela y concourt, mais ce n’est pas suffisant, raison pour laquelle dans notre charte régionale, nous déployons des bornes mais nous voulons absolument que dans chaque territoire il y ait « un monsieur véhicules électriques » qui soit nommé pour inciter les entreprises dans le cadre de leurs flottes captives à acquérir des véhicules électriques, monter des projets de partage de véhicules électriques, du carpooling dans les entreprises, des services d’autopartage à certains endroits. Tout cela est combiné.
Les collectivités montrent l’exemple en matière d’acquisition de véhicules électriques ?
Tout à fait. En vous disant qu’il y a déjà 12 territoires de la région qui ont répondu : Maubeuge, Saint-Omer, Lens, Henin-Carvin…, Dunkerque est prêt à rejoindre le mouvement. Ce sont des territoires déjà assez denses, ils ont déjà des initiatives dans ce domaine.
Il faut aussi se caler sur les directives de l’État, à savoir renouveler 25 % de leur parc en voitures électriques. Il est vrai que la région Nord-Pas-de-Calais est une région solidaire, tout le monde a en tête le Kangoo électrique qui doit réussir, et on en trouve pas mal dans le Nord-Pas-de-Calais.
Région solidaire, des dispositifs d’autopartage sont-ils prévus ?
Il y a un projet d’autopartage dans le bassin minier qui est prévu. Sur Lille, c’est plus lent, le projet doit mûrir. Lille est certainement pour la voiture électrique, mais on n’a pas encore de projet bien concret.
On a des entités locales comme le port de Lille, qui veut desservir le centre-ville en voiture électrique, le CHR de Lille qui est une grosse entreprise au coeur de Lille, 20 000 personnes se rendent tous les jours sur ce site. Il y a des projets ponctuels. Notre cible vise l’espace public, les collectivités territoriales. On ne peut pas confirmer avoir un projet sur Lille porté par la communauté urbaine de Lille comportant 1,2 million d’habitants, cela ne se bouge pas assez vite !
Le plan que vous mettez en oeuvre sert aujourd’hui de modèle au niveau national. Est-ce une fierté ?
Je viens de l’apprendre un peu aujourd’hui avec Philippe Hirtzman qui vient de confirmer que nous sommes pris en modèle par l’État et que le plan Hirtzman est un peu calé sur notre méthode.
Effectivement, nous en sommes un peu fiers et en même temps un peu angoissés, car c’est un travail qui est peut-être un peu simple à dire mais dans les faits c’est tous les jours un vrai combat.
Ce matin, vous étiez intervenant des Assises, vous allez maintenant être observateur. Quelles sont vos attentes par rapport aux travaux des Assises ? Il y a des petites questions sur les prises de type 2 ou type 3, mais cela ne m’inquiète pas du tout. De plus, nous sommes une région transfrontalière, donc nous aurons les deux types de prises (type 2 + type 3).
Mon problème porte plus sur l’interopérabilité des bornes. Quand on a une voiture électrique, il ne faut pas forcément être abonné partout. On dit que la voiture électrique est faite pour de petits trajets, en intra-urbain, mais on devra faire de l’interurbain. Il y a des flux énormes entre le bassin minier et Lille, 80.000 voitures passent par jour. Quelqu’un qui habite dans le bassin minier et qui va travailler sur Lille peut le faire en voiture électrique. En habitant sur Arras, il faut pouvoir recharger sur Lille. Si l’on est contraint par une carte à un abonnement à Arras et que l’on ne peut pas l’utiliser sur Lille, cela ne marchera pas.
Pour moi, l’enjeu d’aujourd’hui est l’interopérabilité : pouvoir recharger aussi bien à Lille qu’à Paris. Si l’on met quelques bornes de recharge rapide entre Lille et Paris, cela signifie que l’on peut se rendre en voiture électrique à Paris, s’il faut prendre ensuite un abonnement Autolib’, ce sera trop compliqué.
Je veux quelque chose de très simple : la possibilité d’avoir accès à de l’électrique partout et simplement.
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