Il aura fallu 8 mois à Jean-Paul Chanteguet et à son équipe de la mission d’information de l’Assemblée nationale pour livrer mercredi 26 octobre dernier un rapport de plus de 400 pages qui fait le point sur l’application de la loi sur la transition énergétique. Petit tour des articles qui coincent, concernant la mobilité électrique.
Priorité aux modes de transports les moins polluants
Pour circonscrire la hausse des polluants et du CO2 dans l’air, ce sont donc les alternatives à l’automobile qui sont mises en avant, du covoiturage au vélo, en passant par l’utilisation d’énergies moins problématiques pour alimenter les moteurs. L’article 37 impose l’acquisition de véhicules propres par l’Etat et les établissements publics. A ce sujet, le rapport remis le 26 octobre 2016 tient à souligner l’effort réalisé par la RATP en la matière, qui s’astreint à un objectif de 50% de la flotte conforme pour 2020, et 100% des bus 5 ans plus tard, dont 80% en électrique et le reste fonctionnant au biogaz.
Vignette
Le certificat de qualité de l’air n’est pas remis en cause par le document. En revanche, le rapport met au jour que le classement en catégories, retenu dans la loi de transition énergétique, « découle en outre de l’arrêté du 21 juin 2016, lui-même dépendant de la réglementation européenne applicable aux véhicules neufs ». D’où une légitime interrogation sur le cumul et l’enchaînement des textes.
Abonnements autoroutiers réduits
L’article 38, qui s’adresse aux sociétés concessionnaires des autoroutes, pose le principe de la différenciation des abonnements selon l’impact sur l’environnement des véhicules. La gratuité avait été notamment évoquée pour les véhicules électriques. « Votre rapporteur constate qu’à sa connaissance, ce dispositif est pour le moment sans suite, et ne doit pas le rester. Il suggère que la loi soit précisée pour rendre plus effectif ce mécanisme, susceptible d’être incitatif à la limitation de circulation des véhicules les plus polluants », peut-on lire en commentaire.
Réduction d’impôts pour mise à disposition de vélos
Il est prévu une réduction fiscale au bénéfice des entreprises qui mettent à la disposition de leurs personnels une flotte de vélos. Ce dispositif a été introduit par un amendement. Les rapporteurs signalent qu’il a fait « l’objet d’une tentative de suppression immédiate de la part du gouvernement ». Il en résulte une application jugée « perfectible » différée, nullement en raison des causes techniques invoquées. Argumentaire des opposants : « La nécessité d’une aide fiscale supportée par l’ensemble de la collectivité pour les entreprises mettant à disposition de leurs salariés une flotte de vélos ne repose sur aucune étude préalable, justifiant une demande forte des entreprises et des salariés qui garantisse le succès de la mesure. Par ailleurs, sa mise en œuvre nécessiterait de régler la question des conditions d’usage extra-professionnel du vélo par le salarié, une fois retourné chez lui. Dans ces conditions, le développement des mesures fiscales en faveur des particuliers pour l’usage du vélo a été privilégié : ainsi, la loi relative à la transition énergétique a renforcé la prise en compte pour les particuliers des frais liés à l’utilisation du vélo pour les déplacements domicile-travail par l’instauration d’une indemnité kilométrique forfaitaire, à la suite d’une expérimentation préalable ».
Stratégie nationale de développement des véhicules propres
L’article 40 assigne à l’Etat le soin de définir sa stratégie de développement de la mobilité propre, qui doit passer par : le développement des véhicules à faibles émissions et de leurs infrastructures de ravitaillement ; l’amélioration de l’efficacité énergétique du parc de véhicules ; les reports modaux de la voiture individuelle vers les transports en commun terrestres, le vélo et la marche, ainsi que du fret vers un acheminement ferroviaire et fluvial ; le développement des solutions collaboratives, notamment l’auto-partage ou le covoiturage ; l’augmentation du taux de remplissage des véhicules de transport de marchandises. Différentes actions sont prévues pour cela (évaluation de l’offre existante de mobilité propre, définition des territoires et des réseaux routiers prioritaires, soumission de cette stratégie au Conseil national de la transition écologique avant transmission au Parlement). Globalement, le rapport valide les processus d’application, mais il met au jour que le document préparatoire à cette stratégie « souligne la nécessité d’anticiper le rôle de l’hydrogène sans s’interroger sur la mise en place de structures de recharge en nombre suffisant pour assurer un maillage territorial pertinent ». Les rapporteurs en appellent d’ailleurs à une meilleure attention autour des travaux de l’Afhypac.
Déploiement des bornes de recharge
Pas de commentaires particuliers sur le programme de déploiement des bornes de recharge pour véhicules électriques et hybrides rechargeables, si ce n’est de dire qu’il est cohérent avec le point 1 de l’article 4 de la directive n°2014/94 UE du 29 octobre 2014. Ce dernier stipule : « Les Etats membres veillent, au moyen de leurs cadres d’action nationaux, à ce qu’un nombre approprié de points de recharge ouverts au public soient mis en place au plus tard le 31 décembre 2020, afin que les véhicules électriques puissent circuler au moins dans les agglomérations urbaines/suburbaines et d’autres zones densément peuplées et, le cas échéant, au sein de réseaux déterminés par les Etats membres ». Le nombre des points de charge doit être en rapport, et c’est le cas, avec l’estimation du volume des engins branchés qui seront mis en circulation. Ainsi, ce sont au moins sept millions de ces points qui doivent être disponibles sur la voie publique, les aires de stationnement ou chez les particuliers, dans la visée de ravitailler, à horizon 2030, 2,5 millions de véhicules hybrides rechargeables et 1,9 million d’électriques. L’article 41 s’intéresse aussi au stationnement, sécurisé ou non, des vélos, dans les ensembles à usage d’habitations, de bureaux, industriels, commerciaux, d’accueil des usagers et agents des services publics, pour les parkings réservés à la clientèle des cinémas, etc. Sur ce point, le rapport signale que les différentes demandes d’amendements déposées ont fait glisser de 5 mois, de février à juillet 2016, la publication des décrets désignés par la loi. En outre, il déplore l’absence d’une obligation d’éclairage, et le sous-équipement de certains garages Véligo, dont celui de la gare du Nord en particulier.
Bonus – Superbonus
Le rapport déposé fin octobre rappelle quelques chiffres pour 2016 : 236 et 30 millions sont les enveloppes respectives allouées au bonus et au superbonus accordés sous conditions à l’achat d’un véhicule considéré comme plus vertueux. Ces montants ont été fixés en prévision de la mise en circulation de 33.000 véhicules électriques (dont 3.380 bénéficiant également du superbonus), 11.000 hybrides rechargeables et 36.000 simples. Commentaire des rédacteurs : « Fixer l’évolution du bonus-malus dans un cadre pluriannuel », une demande qui avait déjà été formulée en son temps par Delphine Batho, alors ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie.
Indemnité kilométrique vélo
Comme pour la réduction d’impôts à destination des entreprises qui mettent à disposition de leurs personnels des vélos pour les trajets domicile-travail, l’indemnité kilométrique vélo s’appuie sur le principe de « gage ». Le rapport précise cette notion : « La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d’une contribution additionnelle à la contribution assise sur les contrats d’assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur, et pour l’Etat par une majoration des droits sur les tabacs ». Les rapporteurs estiment que « le gouvernement devrait faire sauter ce gage, surtout lorsqu’il modifie le dispositif en loi de finances ». Ils justifient : « Soit le gage est inopérant, mais alors pourquoi l’exiger, alors que cela répond à une obligation constitutionnelle, soit il doit être mis en œuvre, ce qui sera matériellement impossible ». Pour comparaison, le document rappelle que, si en France l’IKV est de 25 centimes par kilomètre avec un plafond d’exonérations fiscales à 200 euros, en Belgique, contre 22 centimes du km, il n’y a pas de limites à la prime.
L’IKV fortement commentée
Toujours concernant l’indemnité kilométrique vélo, le rapport interroge sur de nombreux points, et demande une évaluation du système au bout d’un an, et non de 2, comme il a été convenu. Tout d’abord, « le décret prévoit que la distance considérée dans le calcul de la prise en charge est la distance la plus courte entre le domicile et la gare ou station de transport collectif. Le texte ne donne pas de précision lorsqu’un vélo est utilisé aux deux extrémités du trajet, ou entre deux stations de transport collectif en cours de trajet. Ces trajets remplissent-ils les conditions de cumul de l’indemnité kilométrique vélo avec la prise en charge des abonnements de transport ? ». Selon les calculs des rapporteurs, le plafond d’exonérations fiscales ne permet au salarié de couvrir que 800 kilomètres effectués par an à vélo, soit 4 kilomètres par jour s’il travaille 200 jours par an. Ce qui est éloigné du trajet moyen de 7 km avancé par Ségolène Royal pour mettre en avant le dispositif. Un plafonnement à revoir ? Le document se demande également s’il ne faudrait pas prendre en compte la saisonnalité dans le calcul qui deviendrait alors plus complexe, et selon quelles modalités les salariés pourraient-ils être indemnisés pour leurs dépenses entre le 1er juillet 2015 et le 1er janvier 2016, comme le prévoit l’effet rétroactif du dispositif. Et, pour finir, la mission insiste pour que l’indemnité kilométrique vélo soit étendue sans délai à l’ensemble de la fonction publique, y compris aux collectivités locales.
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