Produit par France Stratégie, le rapport sur les politiques publiques en faveur des véhicules à très faibles émissions apparaît très orienté en se concentrant sur les « véhicules électriques pour particuliers », et n’est hélas pas exempt d’erreurs ou imprécisions, dont l’une est plus particulièrement mise en évidence dans les premières lignes de la note de synthèse et le résumé de présentation de ces 2 documents. En revanche, – et c’est peu courant dans une étude officielle -, le rapport plaide très clairement pour la recharge rapide, nécessaire pour accompagner les efforts fournis sur l’autonomie par les constructeurs de voitures électriques.
Fin des véhicules thermiques en 2040 ?
Voici les 2 toutes premières lignes du texte présentant le rapport publié jeudi 31 mai dernier par France Stratégie, institution rattachée au Premier ministre aussi connue sous l’appellation de « commissariat général à la Stratégie et à la Prospective » : « Avec pour objectif ambitieux la neutralité carbone à l’horizon 2050, le Plan Climat prévoit de mettre fin à la vente des voitures émettant des gaz à effet de serre, c’est-à-dire les voitures thermiques, d’ici 2040 ». Les véhicules fonctionnant au GNV sont aussi des « voitures thermiques », et il apparaît certain qu’elles seront encore en vente en 2040, et même que leur pénétration dans la flotte française sera très importante, la neutralité carbone les concernant étant obtenue par le biogaz, produit de la méthanisation. Un maillage en stations se développe pour cela, souvent aidé par l’Ademe, et les constructeurs concernés sont appelés de part le monde à développer des gammes de poids lourds et véhicules légers. Pour la crédibilité des documents officiels, il est important qu’ils soient précis. D’autant plus qu’ils fournissent et rassemblent de précieuses informations.
VE = VE + H2 + VHR
Relever cette imprécision concernant les véhicules thermiques est important, car l’objet du rapport et de passer en revue les contours des interdictions de ventes des voitures particulières alimentées au gazole et à l’essence, mises en perspective avec les stratégies de développement des engins à très faibles émissions censés les remplacer. Et ce dans 8 pays : Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Espagne, Norvège, Etats-Unis, Inde et Chine. Autre flou dans ce rapport, le fait de classer derrière les voitures électriques 2 flottes différentes : seulement les voitures 100% électriques à batterie de traction ; ou, en plus de ces dernières, les modèles à pile hydrogène, et les hybrides rechargeables. Les VHR, avec une autonomie électrique le plus souvent limitée en situation réelle à 35-50 kilomètres, sont loin de pouvoir prétendre au titre de « véhicules à très faibles émissions ». Elles exploitent le plus souvent ces moteurs thermiques qui sont justement appelés à disparaître. Et c’est pour cela que le bonus gouvernemental s’est brusquement réduit il y a quelque temps. Quoi qu’il en soit, les informations que nous communiquons ensuite sont forcément entachées de ces imprécisions !
1,2 millions
En introduction au rapport, France Stratégie livre quelques chiffres importants : « Les ventes de véhicules électriques ont atteint 1,2 million d’unités dans le monde en 2017, soit 1,5% des ventes de voitures neuves, en hausse de près de 60% par rapport à 2016 ». Les auteurs relèvent que « Huit pays, – Chine, Etats-Unis, Japon, Norvège, Royaume-Uni, France, Allemagne et Suède -, représentent à eux seuls 90% des ventes mondiales, avec un marché largement dominé par la Chine : 600.000 ventes, dont 80% de véhicules électriques à batteries et 20% de véhicules hybrides rechargeables ». Le document assure que « quatre pays ont fixé des objectifs d’arrêt des ventes des voitures neuves thermiques à moyen terme : les Pays-Bas en 2030, l’Ecosse en 2032, la France et le Royaume-Uni en 2040 », et souligne le cas de la Norvège qui « a annoncé son intention d’atteindre 100% des ventes de véhicules électriques en 2025 mais sans interdire la vente de véhicules thermiques, les incitations financières devant suffire à obtenir ce résultat ». Autre forme d’intervention des pouvoirs publics, l’établissement de quotas en voitures électriques imposés aux constructeurs, comme en Californie, mais aussi en Chine l’année prochaine. Dans ce vaste pays, des objectifs de ventes en véhicules à énergies alternatives ont aussi été fixés : 2 millions en 2020 ; 3 millions en 2025. L’Inde a révisé son souhait « probablement irréaliste d’aboutir à un parc automobile entièrement électrique dès 2030 », avec, pour la même échéance, 30% des véhicules roulant à l’électricité à la même date. Les auteurs du rapport opposent au dynamisme de ces territoires l’immobilisme constaté dans plus d’une quinzaine de pays de l’Union européenne où les ventes de véhicules électriques en 2017 n’ont pas dépassé quelques centaines, voire quelques dizaines d’unités.
Plaidoyer pour la recharge rapide
Les auteurs du rapport assurent que de voir circuler normalement sur de longues distances des voitures électriques dopera également les ventes de celles qui ne seront pour la plupart du temps utilisées quotidiennement que pour des distances relativement courtes. L’Avem adhère tout à fait à cette vision du développement de la mobilité électrique. Une vision qui fait suite à cette idée officielle des constructeurs et des pouvoirs publics d’il y a 10 ans et plus, imaginant que les ventes des véhicules électriques s’envoleraient chez les professionnels, entraînant dans leur sillage celles des voitures particulières branchées. Ce scénario, dépassé, n’a pas eu lieu ! « Les véhicules utilitaires légers et les poids lourds électriques restent très minoritaires », reconnaissent les rapporteurs. France Stratégie espère « comme c’est déjà le cas en Chine, que chaque modèle de voiture électrique à batterie soit présenté à la vente en plusieurs options correspondant à une autonomie plus ou moins forte du véhicule (et à un coût plus ou moins élevé) ». Le rapport se réjouit des progrès technologiques effectués sur les batteries lithium-ion, distinguant celles de cathode NMC (nickel, manganèse, cobalt) pour lesquelles ils « ont conduit à une division par deux de leur coût ». Ces progrès autorisent « des parcours de moyenne distance voisins de 250 km », certifient les auteurs du rapport qui prévoient pour l’année prochaine des trajets de 400 km permis par des batteries de plus forte capacité (60 kWh). Si le document met en avant les productions Tesla, il cite également : Kia Niro (64 kWh), Nissan Leaf 2019 (60 kWh), Hyundai Kona (60 kWh), Jaguar I-Pace (90 kWh), Audi e-tron SUV (95 kWh), « ainsi qu’un grand nombre de modèles chinois présentés lors du dernier salon automobile de Pékin en avril 2018 ». Des progrès sur l’autonomie qui « supposent la présence le long des principaux axes routiers de bornes de recharge rapide d’une puissance supérieure à 150-200 kW, bien signalées et si possible abritées de la pluie ».
Défis de taille
Les voitures électriques sont loin d’être à la portée de tous les foyers. Ce constat des auteurs du rapport les amène à faire remarquer qu’un arrêt des politiques d’aides à l’achat des voitures particulières électriques est toujours suivi d’un effondrement des ventes. Selon leurs observations, accorder un bonus similaire aux modèles électriques et aux hybrides rechargeables profitera davantage à ces derniers qui sont jugés plus polyvalents par les automobilistes. France Stratégie évoque « un défi de taille pour tous les acteurs dans les trente prochaines années », notamment pour la recharge qui impose : « Le développement du véhicule électrique doit se concevoir dans une réflexion plus globale sur le futur du système électrique ». Pourquoi ? Parce que « le véhicule électrique va entraîner des contraintes supplémentaires dans la gestion du système, mais il peut également apporter des solutions. Comme le montre l’exemple norvégien, il est nécessaire de préparer très en amont les plans de renforcement des réseaux de distribution et de transport ».
Exemples, graphes, comparaisons, programmes en cours, succès et échecs des incitations à l’achat : le rapport publié par France Stratégie est particulièrement dense qui mérite une lecture approfondie et complète. Au-delà des imprécisions que nous avons signalées au début du présent article, il exprime très clairement des directions à suivre impérativement pour le bon développement des voitures particulières électriques. Si la question des énergies renouvelables pour la recharge est abordée à travers des situations observées dans les 8 pays retenus, les défis environnementaux à relever par les véhicules électriques sont loin d’être tous abordés. Hors cadre !
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