Même s’ils ne représentent encore qu’une infime partie de leurs ventes, la plupart des constructeurs automobiles européens se sont engagés résolument dans le développement des véhicules électriques. Mercedes, BMW ou le groupe Volkswagen préparent de nombreux modèles haut de gamme pour préserver leur leadership dans ce domaine et résister à la concurrence de Tesla. Ils n’oublient pas aussi les modèles plus grand public à l’image de Volkswagen qui compte faire de l’I.D. la nouvelle icône de la marque. Renault prépare la seconde génération de la Zoé mais aussi d’autres modèles pour étoffer son offre de véhicules électriques. Même s’il exprime souvent quelques réticences, le groupe PSA prend le même chemin et des Peugeot, des DS et des Citroën électriques verront bientôt le jour. A l’horizon 2025, les véhicules électriques commenceront à représenter une part significative du chiffre d’affaires des constructeurs européens. Des constructeurs qui risquent de se retrouver très dépendants dans un domaine stratégique, celui des batteries des véhicules électriques, aujourd’hui totalement dominés par les pays asiatiques. La Commission européenne mais aussi les gouvernements allemands et français s’en inquiètent et aimeraient pouvoir créer un « Airbus de la batterie ». En attendant, les constructeurs cherchent avant tout à sécuriser leur approvisionnement, tout en investissant dans la recherche sur les batteries du futur.
L’Asie maître du jeu
La batterie est un composant essentiel des véhicules électriques dont elle représente près de 40% de la valeur ajoutée. Rien qu’en Europe, le marché pourrait peser près de 250 milliards d’euros à partir de 2025 selon la Commission européenne. Aujourd’hui, ce marché est totalement dominé par les pays asiatiques. Le Japon avec Panasonic, AESC (alliance Nissan-NEC), Toshiba et Toyota, mais aussi la Corée avec LG Chem, Samsung et SK Innovation ainsi que la Chine avec CATL, BYD et GS Yuasa. Sur un marché qui exige des investissements colossaux pour y entrer, ces pays disposent d’un avantage concurrentiel énorme et continuent à investir pour accroître cet avantage. Ainsi, le champion chinois CATL s’apprête à devenir le plus gros producteur mondial de cellules en quintuplant sa capacité de production dès 2020. Sa prochaine « Gigafactory » de 25 GWh, à Huxi, sera la seconde en taille dans le monde après celle de Tesla. Outre les constructeurs chinois, CATL alimente les groupes étrangers implantés en Chine et va bientôt, à l’image des coréens LG et Samsung, ouvrir une usine en Europe pour mieux alimenter les constructeurs européens.
Constituer un « Airbus de la batterie » : un vœu pieux ?
Cette situation de dépendance sur un marché d’avenir inquiète les autorités européennes qui tentent de réagir. Depuis plusieurs mois, le commissaire européen à l’énergie Maros Sefcovic appelle à la constitution d’un « Airbus de la batterie » avec plusieurs entreprises européennes qui se regrouperaient pour créer un leader dans ce domaine. Ce mois-ci, le ministre de l’Economie allemand Peter Altmeier a embrayé sur le sujet et compte mobiliser un milliard d’euros pour faciliter le lancement d’une production de cellules lithium-ion avec pour objectif que l’Allemagne et l’Europe puissent satisfaire 30% de la demande mondiale d’ici à 2030. Bruno Lemaire a lui aussi plaidé récemment pour qu’une coopération franco-allemande se mette rapidement en place dans ce domaine. Cette volonté politique affichée ne serait-elle pas qu’un vœu pieux ? Certes Total, Saft ou Siemens ont lancé quelques projets en matière de batteries pour véhicules électriques et un consortium de constructeurs, fournisseurs et laboratoires allemands serait en passe de voir le jour, mais d’autres acteurs semblent avoir renoncé. Ainsi Bosch, qui estime pourtant que le marché de la cellule est intéressant, a estimé que le pari était trop risqué compte-tenu de l’ampleur des investissements nécessaires. D’autres comme Northvolt pensent qu’il n’est pas trop tard pour l’Europe qui dispose des compétences nécessaires dans ses laboratoires. Mais, pour son fondateur Peter Carlsson, la difficulté est de passer au stade de l’industrialisation et de pouvoir financer les projets. La volonté politique risque donc de ne pas suffire à moins qu’elle ne s’accompagne de financements conséquents.
Volkswagen se tourne vers SK Innovation
En attendant qu’un fabricant européen de batteries devienne une véritable alternative, le groupe Volkwagen a décidé de sécuriser son approvisionnement et a choisi un fournisseur supplémentaire pour l’alimenter en cellules de batteries dans les principales régions du monde. Le sud-coréen SK Innovation rejoint donc LG Chem, Samsung et CATL comme fournisseurs stratégiques susceptibles d’alimenter, sur le long terme, le groupe pour le développement de son parc de véhicules électriques en pleine expansion. Les différentes marques du Groupe prévoient en effet de commercialiser 50 nouveaux modèles 100% électriques d’ici à 2025. Pour y parvenir, le Groupe Volkswagen estime avoir besoin d’une capacité de batterie supérieure à 150 GW par an. Ceci correspond à une capacité annuelle d’au moins quatre « Gigafactory » de cellules de batteries. Il a donc décidé, à compter de 2019, de s’approvisionner auprès de LG Chem, Samsung et SK Innovation pour ses besoins en Europe, tandis que CATL a été désigné comme partenaire stratégique pour la Chine. De plus, à partir de 2022, SK Innovation couvrira également la demande du groupe sur le marché nord-américain.
Alliance Ventures investit dans Enevate
Quelques jours avant de connaître de fortes turbulences liées à l’arrestation de Carlos Ghosn, l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi avait annoncé son intention d’investir dans le développement des futures générations de batteries. Une volonté concrétisée par la participation d’Alliance Ventures, le fonds de capital-risque de Renault-Nissan-Mitsubishi, à la dernière étape de financement d’Enevate Corporation. Cette société dont le siège est situé en Californie a mis au point une technologie avancée de batterie lithium-ion qui offre une charge ultra-rapide couplée à une haute densité énergétique. La technologie HD-Energy pour véhicules électriques d’Enevate se caractérise en effet par une charge ultra-rapide, de cinq minutes, offrant une haute densité d’énergie ainsi qu’une grande autonomie, y compris par temps froid. Elle présente également un coût réduit et des avantages en termes de sécurité. Pour le Directeur d’Alliance Ventures, François Dossa, l’investissement stratégique dans Enevate doit permettre de soutenir le développement de cette technologie susceptible de contribuer à l’accélération de l’électrification des véhicules de l’Alliance. Reste à savoir à quelle échéance et quels seront les investissements nécessaires pour passer du laboratoire au stade de l’industrialisation ?
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