Renault Group envisage de suivre l’exemple de Ford qui va rassembler ses activités électriques sous l’appellation « Model e ». Le constructeur vient de confirmer son intention de créer un pôle autonome dédié aux véhicules électriques. Une stratégie qui permettra de renforcer l’activité électrique du groupe et de nouer de nouveaux partenariats. Basé en France, ce pôle pourrait regrouper 10 000 personnes dès l’an prochain. Cette entité restera ouverte aux partenaires de l’Alliance à qui Renault présente le projet en détail cette semaine. Le Groupe consultera également les instances représentatives du personnel avant de prendre une décision définitive à l’automne.
Renault Group a annoncé en février avoir lancé des réflexions autour de ses activités et technologies 100% électriques et thermiques. S’inscrivant dans son plan stratégique « Renaulution », ces réflexions visent à renforcer l’efficacité et la performance opérationnelle. Elles doivent permettre d’adapter chaque technologie en tirant parti des atouts et de l’expertise du groupe sur ses différents marchés. Ces réflexions semblent avoir bien avancées et le groupe vient de communiquer sur ses intentions. Renault souhaite créer un pôle dédié au développement, à la production et à la commercialisation de véhicules électriques. Cette entité autonome serait dotée d’un business model adapté aux spécificités de l’électrique. Elle aurait aussi vocation à nouer des partenariats dans les nouvelles technologies ou les services.
L’intérêt de l’opération
Aux USA, la question de savoir s’il faut séparer les activités thermiques et électriques agite le secteur depuis un moment. Certains analystes recommandent à Ford et General Motors d’aller vers une scission. Ils s’appuient en cela sur les valorisations boursières des entreprises spécialisées dans les véhicules électriques telle Tesla, Rivian ou Lucid. Des entreprises dont la valeur surclasse pour Tesla, dépasse pour Rivian ou égale pour Lucid celle de GM et Ford. Pour ces analystes, la séparation des activités électriques de ces dernières leur permettrait d’accéder plus facilement aux capitaux et d’attirer des partenaires. Pour Renault, au-delà de la valorisation boursière, cette stratégie devrait accélérer sa transition vers les véhicules électriques. Ceci à un moment où la marque au losange s’est fixée pour objectif d’être 100% électrique en 2030.
Renault Group veut se positionner comme le leader de la voiture électrique en Europe. Il a fait le choix stratégique d’ancrer en France la production des principaux composants de la chaîne de valeur de la mobilité électrique. Un choix qui illustre sa volonté de développer des activités de haute technologie sur des marchés à fort potentiel. Renault a déjà engagé cette politique en créant autour de Douai un centre de production des véhicules électriques de nouvelle génération. Fleuron de cette génération, la nouvelle Mégane E-Tech electric sort de cette usine qui produira également la future R5 électrique. Les véhicules utilitaires électriques sortiront eux de l’usine de Maubeuge, située à quelques kilomètres. Sur ce pôle industriel baptisé Renault ElectriCity, le constructeur compte produire 400 000 véhicules électriques par an à horizon 2025.
Le périmètre du pôle
Renault ElectriCity constituera bien sûr le plier de la nouvelle entité dédiée aux véhicules électriques. Mais le périmètre du pôle sera plus étendu pour regrouper les activités d’ingénierie liées à l’électrique et aux logiciels. Il comprendra ainsi une partie du Technocentre de Guyancourt dans les Yvelines, ainsi que le Renault Software Lab de Toulouse. Le pôle englobera également le centre technique de Lardy et l’usine de Cléon où sont fabriqués les moteurs électriques. D’autres sites d’Île-de-France pourraient les rejoindre, de même que les fonctions support liées à ces activités. Au total, le pôle dédié à l’électrique devrait comprendre environ 10 000 personnes dès 2023, année probable de sa création. De plus, son positionnement en France a de quoi satisfaire le gouvernement, actionnaire de Renault à hauteur de 15%.
Si Renault s’engage résolument sur la voie de l’électrification de ses modèles, il n’entend pas abandonner totalement l’activité thermique. Il juge même qu’elle présente des opportunités de ventes significatives à long terme en Europe et sur les marchés internationaux. Ceci notamment au regard des améliorations significatives en faveur de la baisse des émissions de ce type de véhicules. Ainsi, en parallèle de la création du pôle dédié aux véhicules électriques, Renault Group envisage la création d’une seconde entité. Une entité dédiée à la production de moteurs et boites de vitesses thermiques et hybrides de nouvelles générations. L’objectif de ce pôle serait de tirer parti de la technologie E-Tech que le constructeur a lancé ces dernières années. Renault envisage également l’exploitation de moteurs GPL ainsi que le développement de carburants synthétiques à faibles émission.
Une entité basée hors de France
Avec cette entité, Renault a l’ambition de créer un leader mondial Powertrain (groupe motopropulseur) au service de l’industrie automobile. Un leader compétitif au bénéfice de Renault Group, des partenaires de l’Alliance et d’autres constructeurs et clients. Cette entité aurait vocation à développer des partenariats industriels et technologiques à la pointe du secteur. Contrairement au pôle véhicules électriques, cette entité serait basée hors de France. Son périmètre engloberait les activités moteurs et transmissions (hors châssis) des usines situées en Espagne (Motores et Séville), au Portugal (Cacia), en Turquie (Bursa), en Roumanie (Pitesti), au Brésil (Curitiba) et au Chili (CorMecanica). Il comprendrait également l’ingénierie et la R&D en Espagne (RTS), Roumanie et Turquie (RTR) et au Brésil (RTA). Enfin, il prendrait en compte les fonctions supports liées à ces activités.
Nissan annonce de solides progrès dans l’exécution de son plan de transformation Nissan NEXT
Pour Renault Group, ces deux nouvelles entités resteront ouvertes aux partenaires de l’Alliance : Nissan et Mitsubishi. Son Président Jean-Dominique Senard et son CEO Luca de Meo sont d’ailleurs au Japon cette semaine pour présenter leur projet. Le sujet était même au menu du conseil opérationnel de l’Alliance qui s’est tenu mardi au siège de Nissan. Nissan dont le PDG Makoto Uchida a indiqué qu’il étudierait une prise de participation dans le futur pôle véhicules électriques. Pour autant, le constructeur japonais ne parait pas prêt à adopter une organisation similaire. Car si l’Europe se dirige vers le tout-électrique, Nissan est aussi très présent en Amérique du Nord et en Chine. Des marchés évoluant à des rythmes différents en matière d’électrification. S’il mise sur l’électrique, Nissan doit donc encore se concentrer sur le thermique qui représente 92% de ses clients.
Une décision définitive à l’automne
Les réflexions engagées par Renault Group semblent aujourd’hui conduire à la création de ce pôle autonome dédié aux véhicules électriques. Pour autant, avant de prendre une décision définitive, Renault va entreprendre diverses consultations. Outre ses partenaires au sein de l’Alliance, des consultations sont menées avec l’ensemble des fonctions concernées dans les pays impliqués. Le développement de ces réflexions stratégiques se poursuivra dans le dialogue social. Des consultations sont ainsi engagées avec les instances représentatives du personnel. Si l’ancrage en France de cette entité devrait plutôt les rassurer, la transition vers l’électrique suscite néanmoins des inquiétudes. La production et surtout l’entretien des véhicules électriques nécessitant moins de main d’œuvre. Des inquiétudes d’autant plus grandes dans un contexte où le marché automobile enregistre aujourd’hui un fort recul. Quoiqu’il en soit, à l’issue de ces consultations, Renault indique vouloir prendre une décision définitive à l’automne.
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