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Résiliation du contrat Bolloré-Autolib’ : Ils réagissent ! Rédigé par Philippe Schwoerer le 19 Juin 2018 à 00:00 0 commentaires

A la suite d’un courrier daté du 25 mai, adressé par le groupe Bolloré au syndicat Autolib’ Vélib’ Métropole, la concession accordée à l’industriel breton devrait disparaître. Dans ce document, le délégataire réclame le versement « de 233 millions d’euros, au titre du déficit prévisionnel du service Autolib’, à défaut de quoi une procédure de résiliation du contrat serait engagée dans un délai d’un mois ». Trois témoins réagissent pour l’Avem à cette annonce qui ne condamnerait a priori pas pour autant le service, mais qui laisse envisager de sérieuses difficultés prochaines pour les abonnés.

Pas une nouveauté

L’annonce d’un déficit pour l’exploitation du service Autolib’ n’est pas une nouveauté. En février 2017, il avait été évalué à environ 180 millions d’euros pour la fin de la délégation du mandat à Bolloré en 2023, dont 120 millions auraient été à solder par la centaine de communes supportant le service (65 millions pour la Capitale). Adjoint EELV aux Transports à la mairie de Paris, Christophe Najdovski avait alors rejeté le principe que les contribuables des villes desservies épongent la dette, souhaitant au préalable obtenir les résultats d’un audit et d’une étude indépendante avec, pour finalité, de disposer de précisions et préconisations pour sortir de cette situation. Aujourd’hui, ce ne sont plus 120 mais 223 millions que Bolloré réclament, pour un service qui est loin de faire positivement l’unanimité. Voilà pourquoi le syndicat mixte Autolib’ Vélib’ souhaite se désengager de l’actuel contrat pour le confier à un autre opérateur.

Refus catégorique

Réunis vendredi dernier 15 juin 2018, les maires des communes adhérentes au service « ont souligné leur refus catégorique de verser la somme demandée par le groupe Bolloré, dont le montant apparaît excessif et dont les fondements semblent particulièrement contestables », peut on lire sur le site du syndicat qui estime « inenvisageable de maintenir à flot un service déficitaire et dont la qualité tend depuis plusieurs mois déjà à se dégrader, tant en matière de propreté et d’entretien qu’en matière de disponibilité des véhicules ». Dans 2 jours, jeudi 21 juin, le conseil syndical examinera la résiliation du contrat avec Bolloré. Présidente du syndicat Autolib’ Vélib’ Métropole, Catherine Baratti-Elbaz a formulé quelques exigences si la rupture de l’accord devenait effective. Cette opération « ne doit pas peser sur les usagers », prévient-elle, promettant de faire « le maximum pour que le service ne s’arrête pas du jour au lendemain », et comptant sur l’industriel breton pour faire « preuve de responsabilité » et « prévoir une transition acceptable vers de nouveaux services ». Sa position, que l’on pourrait qualifier d’offensive, se comprend par les propositions « de nombreux constructeurs, loueurs et startups » qui « ont fait part ces derniers mois de leur intérêt à développer l’autopartage dans le Grand Paris ».

Des conditions à respecter

De son côté, Bolloré a rappelé à travers un communiqué daté également du 15 juin, que, si la possibilité est contractuellement ouverte au syndicat de résilier l’accord, le contrat de délégation de service public prévoit dans cette situation : « le paiement des pertes supportées par le concessionnaire au-delà d’une somme forfaitaire de 60 millions d’euros soit, à fin 2017, 150 millions d’euros ; le transfert de l’ensemble du personnel de la société Autolib’ ; la reprise à la valeur nette comptable des biens du service ; le versement d’indemnités sur les contrats en cours ; la prise en compte des dédommagements commerciaux envers les usagers ». La facture sera donc salée, que la collaboration continue ou soit précipitamment résolue. Pour sa défense, Bolloré plaide : « Les dirigeants du syndicat mixte ont été régulièrement informés de la dégradation financière d’Autolib’ résultant notamment de la concurrence des VTC et du déploiement de stations trop ambitieux imposé par le syndicat ». Et assure que la société Autolib« a proposé au cours des derniers mois des solutions financières et opérationnelles infiniment moins coûteuses et sans interruption du service », systématiquement rejetées par le syndicat.

Un service en cours de délabrement

Alain R., technicien retraité spécialisé en véhicules électriques, ne possède pas de VE. Grâce au service Autolib’ auquel il a été abonné pendant 2 ans, il en utilisait un pour venir au plus court à Paris depuis la petite couronne où il réside. « J’ai résilié mon abonnement principalement à cause de l’état intérieur comme extérieur des voitures. Un jour, je me suis dit : ‘Je ne rentre plus là-dedans’ », confirme-t-il au sujet de l’entretien des véhicules. « Je ne mets pas en doute le sérieux des équipes de nettoyage et réparation, mais j’imagine bien que des voitures passent régulièrement à travers quand elles sont utilisées alors que les techniciens effectuent leur tournée de repérage des exemplaires à rafraîchir », modère-t-il. « Maintenant, je prends les transports en commun qui sont moins coûteux », révèle-t-il. Parmi les points perfectibles qu’il a notés : « La location court tant qu’on n’a pas reçu un texto de fin d’utilisation ; il faut parfois le réclamer, ce qui fait qu’on paye dans ces cas au moins 15 minutes supplémentaires » ; « Le GPS ne sait pas nous proposer des itinéraires pour éviter les bouchons » ; « Quand j’ai résilié mon abonnement, je n’ai reçu aucun retour ni proposition commerciale : ça m’a fait bizarre ! ».

La fin des Bluecar attendue

Pour Frédéric F. qui habite et travaille à Paris : « Autolib’ m’a permis d’avoir un premier contact avec les véhicules électriques, et en particulier les voitures électriques ». Il poursuit : « J’appréciais plutôt assez bien le service, mais la croisade menée par Stéphane Lhomme de L’Observatoire du nucléaire m’a renseigné sur l’énorme gâchis énergétique que constituent les Bluecar pour maintenir la température de fonctionnement de leurs batteries. Je n’ai pas voulu apporter ma caution à cette technologie ». Et maintenant ? « J’ai investi dans un scooter électrique à batterie amovible que je recharge chez moi. Quand il ne répond pas à mes besoins, j’utilise les transports en commun, un taxi ou un VTC ». Il assure : « Si Autolib’ était repris par un autre opérateur, avec des voitures électriques plus adaptées à l’idée que je me fais de la mobilité durable, sans doute que je l’utiliserais occasionnellement. Mais je conserverais mon scooter électrique que je maintiens dans un état irréprochable ».

Un service qui doit perdurer

« Avec mon adhésion à Autolib’, j’ai abandonné l’idée de posséder une voiture », souligne Kevin M., jeune cadre dans une banque. Lui aussi vit à Paris où se trouve son bureau. « C’est vrai que les voitures sont parfois dans un état repoussant, mais je souhaite que ce service perdure, quel qu’en soit l’opérateur. Ma compagne et moi ne résidons pas ensemble, par choix. Elle habite et travaille dans une même ville de banlieue, et je ne souhaite pas qu’elle rentre seule, tard le soir, en prenant les transports en commun. Je la raccompagne donc chez elle le plus souvent avec une Bluecar quand elle doit se lever tôt pour rejoindre l’hôpital où elle exerce », avoue-t-il. Il espère que « la dette réclamée par Bolloré ne soit pas à la charge des Franciliens, même de manière indirecte ». Pour lui aussi, les voitures de Bolloré ne sont pas les mieux adaptées au service. « Passez d’une Bluecar à une Renault Zoé, une Smart ED, une BMW i3 ou une Peugeot iOn, et vous verrez la différence ! », conclut-il.

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